Le ministère de l’Intérieur vient de lancer, un peu dans la précipitation en vue de l’Euro, son application SAIP.

Timing

Sur le plan géopolitique, le pays est en occident un des plus exposés aux attentats. Comme si cela ne suffisait pas, il y aurait aussi une menace intérieure [1]. La compétition de ballon, avec ses grands rassemblements, est le moment idéal pour lancer une attaque qui fera un grand nombre de victimes avec un maximum de retentissement symbolique [2]. Les sites de séjour des délégations, les stades d’entraînement, de compétition et les fans zones sont autant de lieux qu’il est possible de cibler pour des actions illégales.

Autant dire que tous les curseurs du risque attentat vont être en butée dans les prochains jours. Et ce n’est pas le système de sécurité mis en place qui a de quoi rassurer.

Les grandes sociétés de sécurité ayant décliné la mission de protection des fans zones [3], l’UEFA a du se rabattre sur des petits et moyens opérateurs, qui embauchent des personnels plus ou moins fiables [4]. Quant au dispositif secouriste dans les mêmes fans zones, il est dimensionné en dessous des minima réglementaires (exemple : 70 secouristes pour une fans zone de 80000 personnes alors que le minimum est de 76 [5]). Pourtant il ne sera pas facile, pour les associations retenues par l’UEFA (CRF, UNASS, Croix-Blanche, FFSS...) d’aligner des effectifs qui, même réduits, n’en restent pas moins conséquents. Le bénévolat a ses limites, or il faut ici une disponibilité numérique importante et continue sur toute la durée de la compétition.

Quant aux forces de sécurité publique, épuisées par l’état d’urgence qui dure depuis 8 mois [6], par les dernières inondations dans le nord de la France, par l’encadrement musclé des manifestations et des grèves, sur fond d’années de restrictions budgétaires et de baisses d’effectifs, elles feront ce qu’elles pourront.

Les planètes sont donc parfaitement alignées pour que les choses se passent mal. Alors le gouvernement multiplie les exercices attentats [7] et invite la population à télécharger l’application qui l’avertira de ce qui semble désormais, sinon inéluctable, tout de même hautement probable.

Que signifie SAIP ?

SAIP est un de ces sigles dont les technocrates ont le secret. Il signifie « système d’alerte et d’information des populations ». Un temps ambitieux, il se voulait intégrer les actuelles sirènes d’alerte (celles qui sont essayées le premier mercredi du mois) et compléter le message par différents canaux. Notamment, Nicolas Sarkozy avait promis, à l’occasion du congrès des sapeurs-pompiers de 2011, qu’un SMS serait envoyé en mode « push » sur les téléphones mobiles [8]. Un système universel, car tous les téléphones mobiles peuvent recevoir ce type de message, contrairement aux applications qui nécessitent un smartphone. Mais voilà, ce système n’a jamais vu le jour. Entretemps, l’alerte et l’information a tout de même évolué, en France jusque là sous l’impulsion d’initiatives privées comme Qwidam pour l’entraide à l’aide d’une application smartphone, dont nous vous avons déjà parlé [9], et VISOV [10] pour l’utilisation des médias sociaux en situation d’urgence (MSGU).

L’ambitieux SAIP, faute de budget, en est resté aux traditionnelles sirènes, qui tentent de résister à l’usure du temps et aux pannes chroniques [11]. Hors périmètre du SAIP, il y a aussi une application dénommée Alertes Citoyens [12].

L’application Alertes Citoyens, hors jeu ?

L’application se veut « le service français d’information et d’alerte aux populations sur téléphone portable ». Elle propose les alertes météo, crues, qualité de l’air et bison futé. Elle est un peu interactive puisqu’elle permet de partager l’alerte sur les médias sociaux, et d’apporter son témoignage. L’application est ouverte aux services publics locaux et nationaux qui souhaitent l’utiliser. Mais bon, manifestement, le ministère de l’Intérieur a préféré réinventer la roue. On aimerait croire qu’il y a à cela de bonnes raisons, mais les fonctionnalités de l’application SAIP ressemblent quand même furieusement à celles d’Alertes Citoyens, en moins complètes.

Par ailleurs l’application Alertes Citoyens a-t-elle un avenir ? Car si aujourd’hui ses alertes ne sont pas intégrées dans la nouvelle application SAIP, ce serait prévu pour une seconde version dans quelques mois. Dans ce cas les deux applications coexisteront-elles, ou bien SAIP remplacera-t-il Alertes Citoyens ? Mystère. Il faut peut-être attendre de savoir si elle sera massivement téléchargée par le grand public. Mais d’évidence, elle ne semble pas répondre à un besoin réel comme le notent certains : l’alerte SAIP pourrait bien arriver après l’alerte média !

L’application SAIP, qu’est-ce qu’elle fait ?

L’idée de l’application SAIP est issue du retour d’expérience des attentats du 13 novembre 2015 à Paris et Saint-Denis. Elle vous permet de savoir que vous êtes ou serez de manière imminente en danger de mort : on vous avertit d’un attentat, d’une alerte nucléaire, de la diffusion de produits dangereux ou de rupture de barrage. Alertes Citoyens vous évitera d’être mouillé, coincé dans un embouteillage ou d’avoir les poumons irrités par un dépassement du seuil de pollution. Avec SAIP, on joue clairement dans la division supérieure. Mais on vous conseille quand même de jeter un coup d’œil en avance aux comportements adaptés, car en cas d’alerte, vous n’aurez pas vraiment le temps de consulter votre smartphone avant de faire les bons choix.

Géolocalisation

L’application SAIP permet de suivre des lieux ou bien d’être géolocalisé. En fonction de ce choix, vous recevez alertes ou notifications.

Vie privée

Aucune donnée personnelle et/ou de géolocalisation des utilisateurs ne serait remontée ou stockée sur un serveur, selon le ministère de l’Intérieur, en réponse à des craintes [13].

Discrétion

En cas d’attentat, il n’y aura pas d’alerte sonore, mais un écran de notification sur le téléphone, afin d’éviter d’attirer l’attention des attaquants. Par contre pour d’autres types d’alertes, il y aura un signal sonore pour attirer l’attention du propriétaire du smartphone.

Batterie

Même si l’appli reste active en arrière-plan du téléphone, la consommation de batterie serait négligeable.

Fermeture

Pour l’instant aucune API ou flux en ligne n’est disponible pour cette appli, qui permettrait à une application tierce d’en exploiter également les données. De même le code source n’est pas disponible.

Les versions disponibles

L’application est disponible pour iOS et Android, en français et anglais. En ce qui concerne iOS, le minimum est iOS 8 ce qui disqualifie les iPhone un peu âgés.

Pour l’App Store : https://itunes.apple.com/fr/app/sai...
Pour Google play : https://play.google.com/store/apps/...

En savoir plus

 Présentation sur le site du ministère http://www.interieur.gouv.fr/fr/Act...
 Attentat : une alerte smartphone testée à Lyon http://www.lamontagne.fr/france-mon...

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