Hommages au professeur Marcel Arnaud
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- 15 juin 2000 - dernière mise à jour 19 août 2017Le Professeur Marcel ARNAUD dont nous avons le privilège de détenir les archives, a consacré sa vie afin de sauver des vies humaines. Neuro-chirurgien, il découvre vraiment l’horreur des accidents de la route à Marseille et son action face aux conséquences dramatiques des accidents de la route commença après qu’il fut le témoin d’un accident sur une route de Provence, en 1954.
Nous avons publié dans le tome II sur son œuvre dédié à un médecin sapeur-pompier, le Colonel Pierre DUFRAlSSE, des documents retrouvés dans ces archives. Parmi eux se trouve une plaquette intitulée « La pathologie de la route », édité par un laboratoire vers 1964, où l’on trouve une statistique des décès complétée de sa main. Ci-dessous ce texte où Marcel ARNAUD indique que plus de 80 % des blessés de la route sont concernés par les « prompts secours » qui, rappelons-le, dans son esprit comme pour nous démarrent avec les premiers témoins sur place qui doivent être capables de secourir les victimes en détresse.
Extrait de la plaquette « La pathologie de la route », vers 1964
L’action bénéfique des prompts secours peut être ressentie dans le groupe de 80,3 % des blessés qui décèdent dans les deux premiers jours comme le montre ce tableau sur le pourcentage des décès en fonction de la survie :
– moins d’une heure 58,1 % (dont 10 % tués sur le coup)
– entre 1 et 2 heures 8,1 %
– entre 3 et 6 heures 7,3 %
– entre 6 et 12 heures 6,7 %
– entre 12 et 24 heures 4,2 %
– au cours du 2ème jour 5,9 %
– au cours du 3ème jour 1,9 %
– du 4ème au 7ème jour 5,9 %
– du 8ème au 30ème jour 1,9 %"(*)Beaucoup de ces victimes (60 p. 100 de décès dans dans les cent premières minutes) meurent faute de soins éclairés, parce qu’il n’a pas été réalisé immédiatement des gestes souvent élémentaires ou parce qu’un transport mal conçu a aggravé l’état du blessé.
(*) Un certain nombre des données développées dans les pages suivantes ont été empruntées à M. Arnaud (Monographie "Les blessés de la route") et à R. Deleuze (Médecine et Hygiène, N° 615, p. 948 et suivantes, 6 Novembre 1963).
Extrait de la revue Sapeur-pompier éditée par la fédération Nationale des sapeurs-pompiers, n°904, juillet-août 1999
La FNSPF vient d’être destinataire du tome II d’une compilation intitulée MARCEL ARNAUD, LA PROVIDENCE DES BLESSES DE LA ROUTE. Etablie par Didier Burggraeve, président du Conseil d’action pour la prévention des accidents et les secours d’urgence, elle est éditée par le CAPSU. Ce volume est dédié au médecin colonel Pierre Dufraisse, médecin de l’urgence au secours des accidentés de la route, disciple de Marcel Arnaud, et ancien médecin-chef des SP de Vaucluse. Il réunit les photocopies d’articles écrits par Marcel Arnaud ou parlant de son action. On y retrouve souvent les noms de MM. Dufraisse, Bourret, Genaud, Serre, Prim, etc. De nombreuses lettres sont également reproduites.
C’est assurément un très gros travail, qui permettra aux jeunes générations de mesurer l’activité inlassable de ce grand précurseur qu’a été le professeur Arnaud.
Marcel ARNAUD a ainsi mis au point ce que l’on appelle la traumatologie routière, qui déboucha sur une nouvelle doctrine, la médicalisation des secours aux accidentés de la route.
Ce fut d’abord, à sa demande, une « expérience » à Salon-de-Provence, en 1957, avec le Professeur Paul BOURRET qui mis sur pied à l’hôpital de cette ville une « antenne mobile » qui fut baptisée le « G.M.U.R » et que l’on dénomme aujourd’hui le SMUR.
D’autres SMUR se créèrent puis la coordination de ces secours médicalisés. Et c’est un autre disciple du Professeur ARNAUD, le Professeur Louis SERRE, qui inventa en quelque sorte le premier SAMU, à Montpellier.
Dans le tome II consacré à Marcel ARNAUD on trouvera tous les détails de la création du SMUR de Paul BOURRET ainsi que sur la création du SAMU de Louis SERRE.
Nous ne pouvons mieux faire pour rendre ainsi hommage au Professeur ARNAUD et à ses disciples que de publier, ci-après, un article paru dans un numéro spécial du « sapeur-pompier » et qui rappelle des moments essentiels dans l’évolution des secours d’urgence en france.
Dans les archives, toujours, du Professeur ARNAUD, nous avons trouvé un article de la revue La Route, du Secours Routier français (4ème trimestre 1974) précisions annotées de sa main, sur les gestes élémentaires de survie.
Rappelons que cette formation, objet de la réforme du Secourisme en 1977, correspondait totalement aux « 5 gestes qui sauvent ». Il suffit de lire cet article. Tout est dit ! Mais dans l’arrêté définitif, d’autres sujets avaient été ajoutés et les
« G.E.S » n’ont pas pu être retenus pour le permis de conduire. Les « 5 gestes » étaient donc bien le projet initial appuyé par Marcel ARNAUD qui avait, en 1972, donné son agrément à la brochure que nous diffusons gratuitement toujours aujourd’hui.
Article paru dans Le Sapeur-Pompier, supplément au n°895, septembre 1988
Un neurochirurgien face aux accidents de la route...
Professeur Arnaud (1896-1977) : « Désamorcer la mort, relancer la vie »
par Bernard LAYGUES, Communication FNSPFLe colonel (e.r.) Michel Yorillo, ancien chef du corps d’Avignon, ancien vice-président de notre Fédération, s’en souvient comme si c’était hier : le 18 août 1977, le Pr Marcel Arnaud, pionnier du secours routier en France, dont il fut un proche collaborateur, succombait à une crise cardiaque dans la caserne, juste avant un entretien de travai... à 81 ans.
Pour parler de Marcel Arnaud, le colonel Yorillo va droit au but : « Tous les sapeurs-pompiers français instruits au secours routier dans les années 60 et 70 ont eu comme maître, directement ou par mille relais interposés, ce neurochirurgien de renom à l’époque, pionnier de la traumatologie routière. J’ai beaucoup travaillé sous son autorité médicale, avec notamment M. Galégo, l’inventeur de la célèbre cisaille de désincarcération. Le professeur avait les idées ; nous, nous préparions les outils, nous étions ses "mécanos"... Le secours routier fut d’ailleurs pour moi une révélation : c’est ce champ d’activité valorisant - tout comme la lutte contre les feux de forêt - qui a donné son sens à ma carrière professionnelle. D’ailleurs, c’est là que les sapeurs-pompiers contemporains se sont acquis la plus grande part de leur renommée. »
L’essentiel est dit, et bien dit. Reste à rappeler qui fut ce professeur, membre de l’Académie de chirurgie ... Il était né, 21 décembre 1896, à Foix. Etudiant, le voici au front, en 1917, comme médecin auxiliaire, toujours volontaire pour les missions périlleuses. Interne des Hôpitaux de Marseille dès 1920, il obtiendra par concours le titre, rarissime alors, de « chirurgien des Hôpitaux ». En mars 1939, on le retrouve à la direction du bateau-hôpital Maréchal Lyautey, à Port-Vendres, retour de la guerre d’Espagne. Il se réserve d’y opérer les cas désespérés. Elève du célèbre neurochirurgien Martel, il sera, dans le Sud-Est, considéré comme le promoteur, dès 1940, de la neurochirurgie moderne. Après avoir dirigé, de 1946 à 1948, comme lt-colonel, cette spécialité à l’hôpital Coste de Saïgon, le voici de nouveau à Marseille, comme médecin chef de service des Hôpitaux. Il y deviendra, en 1962, chirurgien consultant, puis professeur...
Des « commandos de secours... »
Dix ans avant tout le monde, Marcel Arnaud a perçu ce qu’allait être l’hécatombe routière et le drame des « polytraumatisés » induits en série. De quoi le faire s’engager résolument très en amont de la salle d’opération : « au pied de l’arbre, là même où il convient de désamorcer la mort et de relancer la vie », comme il disait. Alors, il va dénoncer en bloc la mauvaise qualité des premiers secours du moment et l’impéritie des autorités. Ce qu’il veut, avant tout : « de véritables commandos de secours », fondés sur une logistique, des techniques, des matériels et des savoirs nouveaux adoptés par ces sauveteurs-secouristes naturels qu’étaient pour lui les sapeurs-pompiers (il sera un temps conseiller de notre Fédération). En attendant, bien sûr, une vraie médicalisation des secours ...
Sa retraite, il l’a passée au tableau noir de centres d’instruction (tel Nainville) ou d’hôpitaux (comme Necker, à Paris) ; à la tribune de nombreux congrès médicaux (obtenant même des assises de chirurgie sur « Les polytraumatisés de la route ») ; à la rédaction d’articles et de livres (Les Blessés de la route...) ; à la le réalisation de documents audiovisuels ; ou encore à l’animation du Secours routier français... Mais on le vit alors tout autant au beau milieu des tôles froissées lors d’exercices en grandeur réelle qu’il animait, avec un sens aigü de la mise en scène, sur des routes nationales, notamment du côté de Blois.
Avec lui, tout changeait déjà avec les mots. On « ramassait » les blessés ? Lui, il allait les « CUEILLIR ». Image de la main douce et sûre autour du fruit fragile... Une ombre, quand même : la « traction tête-pieds » de la victime dans la méthode Arnaud — translation du sol au brancard par « roulage » — a cédé sous les critiques, précisément, d’une nouvelle génération de neurochirurgiens ... Vérité en deçà... erreur au-delà !
Extrait de la revue La Route, 4e trimestre 1974
Les gestes élétnentaires de survie
M. le Professeur ARNAUD a réuni sous le titre de « Gestes élémentaires de survie » quelques actes très simples, faciles à enseigner, à retenir et à appliquer et susceptibles cependant de préserver la survie des victimes d’accidents de la route, en attendant l’arrivée des secours organisés.
Ces actes devraient être diffusés très largement au public et il est indispensable qu’ils soient connus des candidats au permis de conduire, sans pour autant que le programme de cet examen s’en trouve alourdi.
Ce pré-secours comporte 3 rubriques, désignées d’après le Médecin Général GENAUD par le sigle P.A.S. :
P : Protéger ;
A : Alerter ;
S : Secourir.I. - PROTEGER
1) contre l’incendie en : coupant le contact ; débranchant la batterie ; aveuglant les fuites d’essence ; recouvrant de terre les épanchements de liquides inflammables ; interdisant de fumer au voisinage des véhicules accidentés.
2) contre le sur-accident : en balisant à distance convenable de part et d’autre de l’accident ; balisage diurne au moyen de signaux colorés ; balisage nocturne au moyen de signaux lumineux ou fluorescents ; balisage par temps de brouillard ; en déviant la circulation.
3) contre les intempéries (pluie, froid... )
4) contre le public : en éloignant avec autorité les donneurs de bons conseils, les agités ; en interdisant les déplacements des victimes (sauf si celles-ci sont en situation de danger immédiat) ; en interdisant leur manipulation et leur transport dans des véhicules inadpatés.
II. - ALERTER :
L’alerte est primordiale puisqu’elle doit déclencher toute l’opération secours et que l’arrivée rapide de moyens appropriés dépend de sa bonne réalisation.
– Apprendre à alerter correctement est donc très important.
– Alerter par quel moyen ? Téléphone le plus souvent, parfois estafette.
– Alerter qui ? : - gendarmerie en campagne ;
– police en ville.
– Alerter comment ? : Préciser - la localisation
exacte de l’accident ; - sa gravité (le nombre de victimes ; le nombre de véhicules) ; - ses aspects particuliers (incarcération, danger d’incendie).III. - SECOURIR - Deux cas :
1) La situation des victimes ne les met pas en danger immédiat ;
2) La situation des victimes les met en danger immédiat.l°) Deux urgences majeures sont à considérer, auprès desquelles les premiers témoins peuvent être efficace :
a) le danger d’asphyxie ;
b) le danger d’hémorragie.a) Contre le danger d’asphyxie :
– libération des voies respiratoires des obstacles aussi bien internes qu’externes, au passage de l’air ;
– mise de la tête en bonne position, en respectant le rachis cervical (traction œcipito-mentonnière, puis déflexion) ;
– respiration artificielle orale.b) contre le danger d’hémorragie : compression directe des saignements.
Ces manœuvres doivent être effectuées sur les victimes laissées sur place, afin de leur éviter toute manipulation intempestive.
2°)La situation des victimes peut les mettre en danger immédiat en cas de :
a) risque d’incendie des véhicules dans lesquels sont demeurées les victimes ;
b) risque d’écrasement secondaire des victimes gIsant sur la chaussée.Dans ces cas, des dégagements s’imposent, en s’efforçant de ne pas aggraver la situation :
a) sortie dite « en catastrophe » en maintenant l’axe crâne thorax-abdomen , le corps du sauveteur servant d’« atelle » à celui de la victime ;
b) traction dans l’axe des victimes par les pieds (ou par la tête) et mise en position « de sécurité » par rotation sur l’axe.
3°) Il convient enfin de rappeler les mauvaises positions à éviter ou à corriger, en particulier la position de décubitus dorsal (danger de suffocation par vomissements, épanchements sanguins ou chute de la langue) et il faut apprendre à disposer en position de sécurité les victimes gisant au sol.
Le tome III sur l’œuvre du Professeur Marcel ARNAUD sera, nous l’espérons, achevé pour la fin de cette année puis diffusé. Il sera dédié à Robert DEJOUR qui fut Directeur Général du Secours Routier français, admirateur de Marcel ARNAUD qu’il aida, notamment, avec les moyens de cet organisme.
Mais pour clore cet hommage, nous publions pour la première fois le témoignage de Robert ARDOINO qui, en créant l’ANUR (Association Nationale des Usagers de la Route) au début des années 70 s’associa à la campagne des « 5 gestes qui sauvent ». C’est grâce à l’ ANUR que la brochure vit le jour en 1972.
Avant de mourir en juillet 1999, Robert ARDOINO qui était alors membre du CAPSU, écrivit la lettre ci-dessous qui se passe de commentaires. Mais surtout, à notre demande, il voulut bien faire un effort de mémoire et relater par écrit sa rencontre avec Marcel ARNAUD en 1972.
Ce témoignage (lettre du 23 avril 1999) sera publié dans le tome III mais nous vous apportons dès à présent les précisions suivantes :
Robert ARDOINO :
« j’ai eu l’honneur d’approcher le Professeur Arnaud lors de la présentation du livret 5 gestes (édition NEIR) au CREPS de Valabre.
Ses termes : bien conçu, bonne présentation, lisibilité facile, correspond pleinement, après quelques retouches éventuelles.
Quantité de diffusion, son financement ?
Réponses : Diffusion de masse gratuite. Financement par publicité.
A la fin de l’entretien (environ 40 mn) il a jugé bon devant mon enthousiasme, de me mettre en garde sur l’imperméabilité des décideurs quand à l’application pratique par le 1er témoin ».
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Hommage au professeur Marcel Arnaud
27 novembre 2013 par dieucherche ? la date de 1ere mise en place à hopital NECKER de l’ambulance SAMU qu’en tempts que fonctionnaire de police !! j’ai conduits à un salon agricole à la porte de versailles à PARIS 15eme en ?? 1972 ou 1973 ?