Toute victime d’un accident ou d’un malaise, même sans gravité, peut présenter une détresse psychologique du fait de la survenue de son problème. De plus, les soins apportés et éventuellement l’évacuation seront relativement traumatisants. Par exemple, une immobilisation dans un matelas à dépression, geste technique nécessaire pour éviter l’aggravation d’un traumatisme, place la victime dans une position extrêmement inconfortable, pendant plusieurs dizaines de minutes.

Il apparaît évident que l’acte de « porter secours » ne se limite pas à un ensemble d’actes techniques, issus d’un savoir-faire appris lors d’entraînements et de formations telles que le CFAPSE. Il faut y ajouter un « savoir-être », qui permettra la prise en charge humaine de la situation dans une action solidaire envers la victime. Parfois, on constate sur le terrain que ce comportement solidaire n’est pas toujours spontané chez les secouristes. Aussi nous espérons, par des conseils simples issus de notre expérience de terrain, sensibiliser les intervenants des équipes de secours. Il ne s’agit aucunement d’un traité de psychologie à l’usage du secouriste, mais de quelques réflexions livrées en l’état, qui ne demandent qu’à être débattues.

Au centre de l’intervention : l’urgence ou la victime ?

Pour ne pas aggraver le choc émotionnel de la personne dont on assure les soins, quelques règles simples...

Pour une victime allongée, il est désagréable d’avoir 4 ou 5 personnes debout au-dessus d’elle. Soit toute l’équipe s’agenouille, soit ceux qui doivent rester debout se placent, si elles le peuvent bien sûr, hors du champ de vision de la victime.

Toucher ou déshabiller une victime sont des actes techniquement nécessaires. Pour autant, ils ne sont pas toujours neutres sur le plan émotionnel. Ainsi, lorsque la victime doit être manipulée, palpée, que ses vêtements doivent être découpés, il est absolument indispensable de lui annoncer préalablement ce que l’on va faire.

Les soins apportés ouvrent parfois de fait une porte sur l’intimité de la victime. Toutefois la relation de familiarité ainsi établie est subie et non pas voulue. Aussi l’équipe secouriste s’efforcera de respecter autant que possible l’intimité de la victime. Pour cela, l’équipe doit à tout moment garder ses distances avec la victime : l’isoler physiquement des regards (sous une tente, sous un drap, dans le véhicule), ne laisser que le nombre d’intervenants nécessaires pour effectuer les soins, les autres se retirant de l’intervention. Bien entendu, il convient de faire preuve de respect dans ses paroles. On préférera « bonjour » à « salut », « vous » à « tu », « monsieur » à « mon pote », on évitera les ordres, les jugements, et les paroles agressives.

Savoir écouter et rechercher les informations nécessaires est important, par exemple pour établir le bilan détaillé des lésions de la victime. Ce bilan étant en principe réalisé par plusieurs secouristes, il faut éviter que ces derniers posent plusieurs fois la même question à la victime. Une personne qui doit répéter plusieurs fois la même chose aura le sentiment de ne pas être écoutée, prise en compte. Il est donc préférable que la victime n’aie qu’un seul interlocuteur dans l’équipe de secours, qui lui pose les questions et recueille ses plaintes. Si l’interlocuteur venait à changer, l’équipe s’assurera que les informations sont bien transmises.

Savoir informer est un point également important, bien que délicat. Pour une victime, la parole des premiers soignants que sont les secouristes, est marquante. C’est avec cette équipe (ou avec un tiers) que la victime en détresse psychologique a tissé des liens, a pu exprimer sa douleur, sa peur. En principe, elle aura confiance en ce que vous lui direz et les paroles de l’équipe secouriste vont lui permettre de se faire une idée de la gravité de ses lésions et de se projeter dans l’avenir. Par conséquent, il est nécessaire de bien mesurer les informations délivrées à la victime. En l’occurrence, il est prudent de ne pas se prononcer sur les examens et les soins médicaux qui pourraient être prescrits à la victime à l’hôpital, ni sur son avenir fonctionnel.

Le comportement de l’équipe est également un facteur nécessaire à l’émergence de la solidarité vis-à-vis de la victime. Chaque secouriste doit connaître ses limites et accepter celles des autres. Prenons un exemple. Il n’est pas rare que le choix d’une technique secouriste plutôt qu’une autre soit susceptible d’être discuté. Dans ce cas, il appartient aux équipiers de s’isoler rapidement afin de prendre une décision en toute connaissance de cause. Une controverse au-dessus de la personne secourue enlèvera toute crédibilité à l’équipe intervenante. Par la suite, il sera difficile sinon impossible d’établir une relation de confiance avec la victime.

En conclusion, voilà quelques exemples simples de comportements au quotidien susceptibles d’éviter l’aggravation de l’état psychologique de la victime. Chacun pourra les confronter à son vécu et en trouver bien d’autres. En tout état de cause, la capacité à prendre du recul par rapport à l’urgence sanitaire et à se recentrer sur la victime sera salutaire pour le bien-être psychologique de la victime. Au-delà, les qualités nécessaires à l’écoute et au dialogue avec la victime, comme la disponibilité, la curiosité, l’humilité, le respect, l’adaptabilité, le savoir-écouter, le savoir-informer... ne sont pas toujours réunies dans chaque secouriste. En revanche elles peuvent être réunies dans l’équipe en additionnant les qualités de chacun. D’où l’intérêt du travail en équipe, à condition bien sûr que le tissu relationnel dans cette dernière soit suffisamment étoffé !

Mis à jour avec la participation d’Yves Benisty

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